Point d'entrée
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\\ Au train où les choses vont...
J'admire le train, ce lieu, mouvant mais tout de même un lieu, dans lequel tu peux, te reposer, en regardant le paysage, te défiler, perdre tes yeux dans le temps qui s'étire au large, t'endormir en jouant à saute-buisson sur les moutons ou en comptant les taches de vaches déchirées qui passent à grande vitesse sous un ciel ajourné, où tu n'as plus à courir, tu n'a plus d'échéance, plus aucun stress, plus d'artifices, plus qu'un sandwich au thon, en prenant le train, tu prends le temps de vivre enfin, pour toi, sans te préoccuper, de la vitesse, des accidents, des collisions, des raillements, de l'absence de contrôle qui régit ta vie, de la destination quand tu ne sais plus que réagir.
J'admire le train. Mais je ne sais pas si c'est réciproque car quand je suis sur le quai.
Qu'il est à quelques mètres.
A chaque fois.
Que je fais un pas.
Lui, il avance d'autant.
Si j'accelére le pas. Il accélère d'autant.
Il s'arrête à son tour. Et reste immobile jusqu'à ce que j'essaie à nouveau de m'avancer. Dans ce cas, il repart, quelques mètres plus tard, juste ce qu'il faut, tu sais, toujours suffisamment, ce qu'il faut, pour que je continue à croire, qu'il y a un espoir, qu'il est à ma portée. Que je peux prendre ce train si je le surprends.
Quand nous ne bougeons plus, nous ne bougeons plus. Simplement il siffle pour faire l'innocent. Et si je lui tourne le dos, il continue à me regarder. Mais.
Si je reviens sur mes pas, il se met en mouvement. Dans son autre sens. Se met à me suivre.
Et si je brusquement vers lui, il s'arrête surpris, puis toussote une fuite, tellement lente d'inertie que je peux presque l'atteindre avant qu'il ne reprenne son élan vers son éloignement.
On peut jouer comme cela des heures entières durant, et parfois des années. Années d'allers-retours, de danses de politesse solitaires, d'essais en apnée désolés, des sauts desespérés des patiences défiées. Des scènes de dédain face à ce train hautain, à se casser les reins ou à se mater en chiens de fiancés chiens qui ne se connaissent pas et sont censés cohabiter.
Lorsque le plus souvent, je finis lassé de lui courir après, je quitte la voie ferrée et me dirige vers la ville la plus proche ou la campagne la plus éloignée, et généralement, comme un trop vieil ami, le wagon, je l'oublie. Mais toujours, au bout d'un jour, d'une semaine, d'un mois, parfois d'un trottoir, je le recroise, immobile à bonne distance, prêt à recommencer à jouer avec ma compulsivité, surement il sait que je me laisse encore aller à vouloir monter, dans ce train que j'admire de trop.
Maintenant que plusieurs tours du Monde sont passés, je peux le dire, en vérité, je n'ai jamais eu la moindre chance de réussir à l'attraper. Il m'aura baladé, par le bout du nez, m'en aura fait, voir de toutes les, couleurs il est, le train que je ne prendrais jamais, et je viens de le réaliser. Réaliser qu'il me faut arrêter de courir après ce train, car je l'ai raté, en le dessinant, je l'ai complètement raté. Arrêter de courir comme un dératé, un rat, de laboratoire quand le champ est si vaste autour, qu'un tel territoire est offert. De répondre à ses provocations, à ces affirmations simples faciles enfermées enchaînées à une voie ferrée. Je me sens libéré! Il n'y a pas deux fois toutes aussi tracées. Pas de vies transportées sans la sueur du voyage. Les nuages ont la forme qu'on saura inventer. Cette rame peut m'attendre aux âges qu'elle voudra. Ce train-train quotidien, ce "rien", ce "personne". Je me sens libéré de ce train fantôme. Si je cours désormais, je veux courir comme un homme.
(nu dans l'atome)
J'admire le train. Mais je ne sais pas si c'est réciproque car quand je suis sur le quai.
Qu'il est à quelques mètres.
A chaque fois.
Que je fais un pas.
Lui, il avance d'autant.
Si j'accelére le pas. Il accélère d'autant.
Si je cours. Il s'esbroue. Si je me précipite. Il soubresaute et se met à me rouler plus vite. Si je m'arrête.
Il s'arrête à son tour. Et reste immobile jusqu'à ce que j'essaie à nouveau de m'avancer. Dans ce cas, il repart, quelques mètres plus tard, juste ce qu'il faut, tu sais, toujours suffisamment, ce qu'il faut, pour que je continue à croire, qu'il y a un espoir, qu'il est à ma portée. Que je peux prendre ce train si je le surprends.
Quand nous ne bougeons plus, nous ne bougeons plus. Simplement il siffle pour faire l'innocent. Et si je lui tourne le dos, il continue à me regarder. Mais.
Si je reviens sur mes pas, il se met en mouvement. Dans son autre sens. Se met à me suivre.
Et si je brusquement vers lui, il s'arrête surpris, puis toussote une fuite, tellement lente d'inertie que je peux presque l'atteindre avant qu'il ne reprenne son élan vers son éloignement.
On peut jouer comme cela des heures entières durant, et parfois des années. Années d'allers-retours, de danses de politesse solitaires, d'essais en apnée désolés, des sauts desespérés des patiences défiées. Des scènes de dédain face à ce train hautain, à se casser les reins ou à se mater en chiens de fiancés chiens qui ne se connaissent pas et sont censés cohabiter.
Lorsque le plus souvent, je finis lassé de lui courir après, je quitte la voie ferrée et me dirige vers la ville la plus proche ou la campagne la plus éloignée, et généralement, comme un trop vieil ami, le wagon, je l'oublie. Mais toujours, au bout d'un jour, d'une semaine, d'un mois, parfois d'un trottoir, je le recroise, immobile à bonne distance, prêt à recommencer à jouer avec ma compulsivité, surement il sait que je me laisse encore aller à vouloir monter, dans ce train que j'admire de trop.
Maintenant que plusieurs tours du Monde sont passés, je peux le dire, en vérité, je n'ai jamais eu la moindre chance de réussir à l'attraper. Il m'aura baladé, par le bout du nez, m'en aura fait, voir de toutes les, couleurs il est, le train que je ne prendrais jamais, et je viens de le réaliser. Réaliser qu'il me faut arrêter de courir après ce train, car je l'ai raté, en le dessinant, je l'ai complètement raté. Arrêter de courir comme un dératé, un rat, de laboratoire quand le champ est si vaste autour, qu'un tel territoire est offert. De répondre à ses provocations, à ces affirmations simples faciles enfermées enchaînées à une voie ferrée. Je me sens libéré! Il n'y a pas deux fois toutes aussi tracées. Pas de vies transportées sans la sueur du voyage. Les nuages ont la forme qu'on saura inventer. Cette rame peut m'attendre aux âges qu'elle voudra. Ce train-train quotidien, ce "rien", ce "personne". Je me sens libéré de ce train fantôme. Si je cours désormais, je veux courir comme un homme.
(nu dans l'atome)
Entré par Bibasse, le Lundi 13 Octobre 2008, 02:07 dans la rubrique "Aura des paquerettes".
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Thème inspiré par Bryan Bell.
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