Corps et âme dans les cartons, entourant les incises les plus acérées de papier bulle, baillonnant les bouches béantes de bandes adhésives.

Une nouvelle vie s'annonce, irrémédiable. Ses découvertes, ses nouvelles rencontres, ses nouveaux horizons. Elle fera reposer et viellir l'ancienne, comme un bon vin dont la fragrance danse, entière, sur sa lie. Et tant pis pour les tâches. Pour l'instant c'est le cartonnage. Encore une semaine à passer avec toute ma vie condensée dans des cartons, juste le nécessaire de sortie pour des questions, indépendantes de ma volonté, de rationalisation des déplacements. Ca ira vite si on considère que la moitié de mes affaires sont restées emballées depuis mes deux derniers déménagements. Et puis après celui-ci, ca sera encore d'autres semaines en carton, le temps -et le temps c'est de l'argent- de meubler. Il y a toujours des cartons pour nous rappeller qu'on est simplement de passage. Et c'est pas résistant en plus, le carton, surtout pas à l'eau salée. Certaines boîtes ne s'ouvriront plus, car l'essence des objets qu'elles contiennent n'aura pas su déménenager. Elle reste là ou elle s'est consumée. On les reconnait au bruit instable de la porcelaine qui pleure pour qu'on se souvienne de ne pas la fêler. Et aux lettres capitales tranchées sur le carton.

HAUT

BAS

FRAGILE